BTPmatériels Algérie : SGGT Algérie est allée à contre-courant concernant l’incrimination du facteur humain, premier responsable du nombre d’accidents et demorts selon, évidemment, les données des pouvoirs publics. Doit-on comprendre que, pour réduire les accidents, il va falloir utiliser les glissières ?
M. Zine Artebas : Non, je dis simplement que ce sont les techniciens qui doivent décider selon le niveau de retenue, quelle est la solution la plus adéquate. Evidemment, si vous allez chez celui qui fait le béton, il vous dira que ce sont les retenues en béton qui sont lameilleure solution.Maintenant, dans ce cas, quand il y a un accident, dans quel état seront les victimes à l’intérieur ? Sur les routes algériennes, des usagers ont assisté à des essais choc en live ; la voiture qui tape dans la retenue ou glissière fait ensuite des tonneaux. Dans les critères, il faut qu’on exige des normes et que le cahier des charges soit ouvert, surtout que nous allons déjà dans des normes qui fixent les responsabilités.
Donc, selon vous, cela est décidé à l’avance…
Les textes ne sont pas clairs. Normalement, les cahiers de charges doivent rester ouverts et c’est au technicien de décider. On va vers des voies plus exigeantes sur le plan de la responsabilité. A partir de janvier 2012, on passera aumarquage CE.
Quelle différence y a-t-il entre la retenue que vous avez proposée en acier et celle en béton ?
Les contraintes pour la norme EN 13 17 sont trop élevées en béton, trop élevées en coût et par rapport à la EN 1 3 17 en métal. Mais il y a responsabilité en cas d’accident. Loin de critiquer le béton, ce qui chagrine, c’est que je lis des articles qui défendent le béton ; ces fabricants de machines pour faire des retenues en béton ne sont pas des gens qui développent ce produit pour la sécurité, qu’il soit métallique ou en béton. Nous n’avons jamais fait venir un fabricant de glissières pour parler dans un symposium pour qu’il nous parle des bienfaits de la glissière métallique. Ce sont nos ingénieurs qui ont un savoir-faire qui fabriquent les glissières. Quand on voit le chiffre d’affaires que les fabricants de machines qui produisent des retenues de béton — qui ne sont même pas à la norme EN 13 17 en béton en l’Algérie — et qu’on voit le nombre de morts, on est étonné que cela grimpe de la même façon. C’est l’eldorado pour les fabricants de machines.
Les contraintes des retenues en béton sont multiples, au-delà du fait que rares les fois où des personnes s’en sortent indemnes aumoment de percuter cellesci, et puis, pour peu qu’il pleuve un peu plus que d’habitude, nos autoroutes deviennent desmarécages grâce à ces retenues en béton. Au vu et au su de tout le monde, au journal du 20h, lors des dernières inondations, on a vu des scènes qui pouvaient interpeller, à savoir que des gens cassaient cesmêmes retenues en béton pour faire circuler l’eau. Alors qu’avec les glissières en métal, ce problème ne se serait jamais posé : les routes ne peuvent pas être inondées en cas de forte pluviométrie. Lesmachines du béton et des retenues sont chèrement payées par l’Algérie, mais on ne tire pas encore d’enseignements. L’Algérie paye quelque chose comme 6 000 DA lemètre linéaire, puis, on prend desmasses et on casse dans le cas des inondations. Les ouvrages d’art, à savoir les ponts, normalement, ils devraient être sécurisés par des retenues au plus haut niveau de sécurité et, là encore, on a vu des retenues en béton. Il y a des voitures qui sont tombées des ponts. C’est ce genre d’accident qui m’interpelle puisque à tous les coups on met cela sur le compte de la fatalité. Il y a des moyens d’éviter l’irréparable en pertes humaines.
Qui est SGGT et pourquoi votre présence en Algérie ?
On est venu, et ce qui a a2ré le groupe Heintzzman vers l’Algérie, indépendamment des projets, est le nombre effarant de morts sur les routes algériennes. Le groupe est leader dans les produits de sécurité pour infrastructures routières. Le cas Algérie, à ce sujet, est un cas qui a interpellé le groupe. Le nombre de morts dépasse de loin la normale. Le groupe développe des produits pour sauver des vies humaines. Donc, on trouve insensé que des produits pour réduire d’une manière drastique le nombre de morts ne soient pas utilisés par un pays comme l’Algérie.Notre métier numéro un sur la route est la glissière de sécurité. C’est pour cela que nos slogans est : «Votre sécurité est notre priorité ».
Donc, vous n’êtes pas convaincu que le facteur humain n’est pas l’une des principales causes de ces accidents mortels…
Ce n’est pas qu’on n’est pas convaincu pas les facteurs humains. On n’est pas les seuls à ne pas être convaincus. Ce qui se passe est que le facteur humain dans le monde entier représente jusqu’à 97%de la cause de l’accident. Cela est clair.Mais le problème est qu’on est passé à une autre approche dès la fin des années 1970. On est, depuis lors, dans l’approche des routes qui pardonnent. Ce n’est pas parce que le conducteur fait une bêtise, qu’on doit le condamner. Au contraire, on doit le sauver, le sortir de la voiture, par certaines mesures et produits et, ensuite, il payera sa faute. Mais, on part du principe qu’il faut sortir vivants et le conducteur et les passagers.
Donc, selon vous, les glissières ont un grand rôle à jouer dans la sécurité et, si possible, à quelle hauteur…
La glissière est importante, mais il ya le marquage de qualité, la signalisation. Il faut reconnaître que la glissière joue un rôle prépondérant, en termes de pourcentage, c’est le plus élevé, soit de 30 à 35 % ; le reste bien sûr ce sont les mesures préventives, les radars, l’aspect policiers et gendarmes. Mais cet aspect estmoins important que lemarquage et la signalisation en général.
Qu’en est-il en Algérie?
Quand on est arrivé, en 2007, il n’y avait pas du tout de normes, ni d’institutions d’homologation.
Donc, bien sûr, on pouvait ne pas venir. Dans ce cas, l’absence de normes qui nous me1rait de fait dans un contexte de concurrence déloyale. Donc, il y a eu, d’abord, la création de la fameuse commission des équipements purements routiers (Commission des équipements routiers permanente ou CPER). Moi, je pense que c’est une institution qui honore l’Algérie. Et depuis, nous sommes homologués. Mais le problème qui se pose encore c’est qu’on exige l’homologation de la Cper pour le marquage mais pas pour la glissière. N’importe quelle glissière peut être placée par n’importe qui en Algérie.
Alors, avez-vous du mal à placer vos glissières ?
Normalement, il y a de la place pour le leader mondial, mais il y a des opérateurs qui exigent la norme, voire même la plus élevée aumonde comme la EN 13 17 qui est adoptée par la Cper ainsi que par l’IANOR. Malheureusement, elle n’est pas exigée. Il est vraie, certes, qu’on est installésmais c’est dérisoire face à des concurrents d’Asie et des voisins du Maghreb qui sont loin dans de la norme. Donc, on est incomparable. Car, pour nous, l’élément essentiel dans nos glissières — pour le réitérer encore — est la sécurité. Nous avons des produits standard qui ne s’appliquent pas ; c’est là où on joue notre rôle pour faire baisser d’une manière drastique le nombre de morts. Mais nous travaillons sur du spécifique. Par exemple, sur un tronçon où on enregistre tant de morts annuellement, on s’applique à trouver des solutions pour cela. Mais jusqu’à ce jour, on n’a pas connu d’échec, et nous sommes passés aux essais au choc.
Mais qui devrait imposer ce$e norme ?
Le ministère des Travaux publics, mais ce qu’on a découvert sur le marché algérien, une fois installés, est que dans les pays développés où la sécurité routière est exigeante, c’est leministère des Transports qui exige les normes. Le ministre des Travaux publics à travers la Cper homologue des produits mais le ministère des Transports est responsable du bilan des accidents. Donc, c’est lui qui est comptable alors, c’est lui qui doit exiger. Sur le terrain, la Cper et l’Ianor n’ont pas d’autorité à l’application.
Avez-vous déjà vu des produits non conformes ?
On a vu des glissière rouillées avant l’inauguration de la route comme on a vu plus grave : des glissières tomber avant la réception des routes. C’est pour cela qui dit norme EN 13 17 dit qualité des produits et qualité de montage et dit aussi définition des responsabilités. Donc, s’il y a mort d’homme, et que la glissière n’a pas fonctionné, on est responsable. C’est pour cela qu’on ne donne pas notre glissière à n’importe quel applicateur ; nous supervisons le montage de la glissière. C’est un produit qu’on ne donne pas aux importateurs.
Et stratégiquement, nous a1endons l’exigence de ce produit, pour avancer dans nos discussions avec Tube Profil et Anabib pour essayer de le produire sur place. Nous sommes au stade des pourparlers. Nous ne pouvons pas avancer si lemarché n’est pas là.
Jusqu’à maintenant, nous avons fait des démarches volontaristes mais nous n’avons pas encore abouti. Nous espérons toujours que les décisions reviennent entre les mains de techniciens. Le politique doit donner un souffle à la stratégie mais le technique doit rester entre lesmains du technique et ce n’est qu’à ce moment que nous allons prospérer.
Dans un cahier des charges, on ne doit pas préciser le type de retenue si elle est en métal ou en béton mais juste le niveau de retenue, à savoir qu’elle renvoit un camion ou bus et, à cemoment, tout lemonde propose sa solution et les techniciens décident.
C’est quoi la norme pour les accidents sur les autoroutes ?
Normalement, quand on crée une autoroute, on doit diviser le nombre d’accidents et demorts en 4, alors qu’ici les chiffres grimpent. Prenons l’exemple de l’autoroute : c’est la première fois qu’on voit une autoroute au monde avec des retenues en béton à gauche, à droite et aumilieu.
Et là, je ne vous ai pas encore parlé du béton en termes de sécurité, c’est-àdire le paramètre ASI. C’est la sévérité du choc qui est divisée en trois : les niveaux A, B, et C. Le niveau A : pas trop de dégâts ; le niveau B : il y a blessures ; le C : la chance de survie est quasiment nulle. Dans les essais de choc, la glissière métallique n’est jamais arrivée au niveau C lors des essaismais la retenue en béton est plus dans le C.