Acteur du secteur de l’aéronautique, Samy Houam, en sa qualité de dirigeant d’un institut de formation dans le secteur de l’aviation Ifap, revient dans cet entretien pour relancer les pouvoirs publics qui ont manifestement affiché, la volonté de diversifier l’économie hors production hydrocarbure. Saisissant cette opportunité d’ouverture, il revient sur les intérêts à compter sur le secteur de l’aéronautique en tant que levier d’innovation et gage de progrès économiques. Il intervient pour la seconde fois sur nos colonnes en invitant les responsables à accélérer l’ouverture du secteur de l’aéronautique. Pour lui, l’économie algérienne constitue une solution clé aux multiples défis auxquels fait face l’Algérie dans un contexte mondial de l’après Covid, ou il considère que l’aviation générale est l’une des voies du salut pouvant contribuer à la croissance économique recherchée en Algérie.
Pouvez vous nous en dire comment votre secteur peut-il contribuer à l’essor de la nouvelle Algérie qui consacre une part belle à l’économie dans un nouveau contexte mondial d’après Covid19 ?
Sortir de la politique économique dépendante du pétrole, incombe aux pouvoirs publics de revoir son modèle économique est de l’avis de nombreux experts, pas que du mien. De nombreux domaines méritent un intérêt à être développer. Selon les éléments de ma compétence, le développement de l’Algérie dépend aussi de la mobilité des personnes qui appellent à échanger et à apprendre. Le transport aérien, par exemple, en est le meilleur moyen car il s’inscrit dans la problématique de « la Connectivité sociale », au regard de sa rapidité et de son efficacité. Dynamiser les échanges internationaux de biens et de services ainsi que des facteurs de production en assurant leur transport est une condition primordiale pour le succès des activités économiques. La fourniture de services aériens est créatrice d’emplois et partant, de valeur ajoutée. L’aviation est aussi largement associée au mode de vie des plus riches et des plus puissants de la société. L’aéronautique est une industrie qui participe au progrès économique et social. Elle reste toujours en première ligne lorsqu’il s’agit d’innovation et demeure en permanence à l’affût de l’évolution technologique.
De quelle façon l’aviation pourra t-elle être ce levier de croissance dans un pays comme l’Algérie qui n’est pas industriel dans ce domaine?
L’aviation générale qui regroupe toutes les activités aériennes civiles autres que le transport commercial, (sportive et de loisirs, tourisme, travail aérien, formation, épandage agricole, lutte contre les incendies, photographie et cartographie, surveillance aérienne, aviation d’affaires, drones, ……) représente 80 % de la flotte mondiale d’appareils civils. Elle a pu aider certains pays de très vaste superficie à se développer. C’est évidemment, je cite le cas des Etats unis qui compte 600 000 pilotes et 200 000 avions dont 65 % des vols sont effectués pour les entreprises et les services publics qui ont besoin de transport plus flexible que les compagnies aériennes peuvent offrir. Je citerai aussi le cas de la Slovénie où, l’aviation ultra légère civile pourtant interdite pendant longtemps, s’est distinguée en juin 2020 à travers le constructeur Slovène. Ce dernier a conçu le premier avion électrique certifié en Europe, ce qui ouvre la voie à un développement d’une aviation durable dans ce pays.
Peut-on avoir quelques chiffres de cet apport, hormis, que ce soit un secteur fort employeur ?
Une grande part du trafic de l’aviation générale se fait selon les règles de vol à vue. Dans ce cas, les installations au sol nécessaires ne requièrent pas une grande sophistication et le vol peut se dérouler sans contrôle aérien. Il couvre entièrement ses coûts d’infrastructures et il est un contributeur net au Trésor Public par le biais de la fiscalité, par exemple aux USA l’aviation générale génère plus de 150 milliards de dollars en activité économique annuelle et crée 7,6 millions d’emplois.
Quelles sont les activités à développer à titre privé et leur rentabilité ?
Le marché de la mobilité urbaine (Urbain Air Mobility), entre autres, « Air Taxi » est une nouvelle génération de véhicules aériens légers (hélicoptère, VTOL, UAV) capables de déplacer des personnes ou des petites marchandises silencieusement, en toute sécurité et efficacement dans des environnements urbains denses. La valeur de ce marché pour l’Europe est estimée à plus de 4 milliards d’euros d’ici 2030, notamment, Le concept a été réalisé à Sao Paulo, au Brésil, avec plus de 15 000 passagers transportés.
Qu’en est -il de l’ouverture et de son développement en Algérie ?
En Algérie, l’absence réelle jusque-là d’une réelle volonté politique soutenue par le protectionnisme dans la gestion de l’aviation a conduit à une incapacité d’appliquer une politique aéronautique cohérente et dynamique. D’où, aujourd’hui, la nécessité impérieuse de désenclaver, de mettre en valeur rapidement et au moindre coût le territoire. Cette action peut être effectuée à travers, le développement des liaisons internes et la participation active du secteur privé, l’amélioration et le renforcement des relations commerciales internationales afin de stimuler des entrées de devises issues des activités des compagnies aériennes, prestataires et fournisseurs de services aériens , la libre fixation des prix (jours creux et hors saison) et la non limitation de capacité ou de fréquence des déplacements ; le respect de la conformité pour des raisons évidentes de sécurité et d’efficacité du transport aérien et l’intégration des nouvelles technologies ; le soutien puissant aux écoles de formation et l’implication forte dans la formation des nouvelles générations ; l’accroissement de la productivité avec l’accès à la formation continue conjugué à la recherche de jeunes talents qui se distinguent dans le domaine du management ; le renforcement des capacités des autorités de l’aviation et de la collaboration avec des régulateurs, à la fois techniques et non techniques, pour aider à garantir la nouvelle politique d’orientation de l’aéronautique prônée par les pouvoirs publics et pour soutenir le développement de l’aviation générale en Algérie.
K.A.