Le marché de l’immobilier en Algérie n’est pas un marché homogène. L’acquisition d’un logement relève du parcours du combattant. En effet, il existe deux façons d’acquérir un logement en Algérie : soit chez le promoteur public ENPI, appelé le logement LPP, soit chez le promoteur privé. Cette équation à deux inconnues semble simple mais difficile à résoudre en raison de la complexité déjà des conditions d’éligibilité. En finalité, on se retrouve confronté à un deux poids deux mesures : soit on est bénéficiaire d’un logement dans le cadre public, soit on l’achète chez le promoteur privé au prix fort.
L’incapacité de répondre à l’objectif d’une production annuelle de logements qui normalement serait, selon le taux attendu, de 200 000 unités/an est malheureusement très loin du taux des 80 000 logements/an réalisés durant l’âge d’or des entreprises publiques DNC et autres, soutient un P-DG d’une entreprise publique rencontré au dernier Batimatec. Un déséquilibre qui a permis, par ailleurs, aux spéculateurs de vendre à l’aise.
A noter que depuis l’introduction de la formule LPP, qui est venue succéder à celle de l’AADL, le tarif du m2 du logement a triplé. En effet, un logement F3 (70m2) AADL revient au prix de 270 U DA, alors que son équivalent en LPP (80m2) est proposé à 6,4 millions DA. Cette hausse des tarifs du logement public a permis de spéculer dans les tarifs du logement proposé dans le segment des promoteurs privés qui ont surenchéri leurs prix entre 2013 et 2014.
Aussi, vu que le marché est déficitaire en logements de plus de 1,6 million d’unités sur la demande globale, cela les a conforté dans leur démarche d’une politique de prix revue à la hausse pour atteindre des sommets vertigineux même pour un haut cadre qui touche entre 100 000 et 200 000 DA par mois. Si le premier est moins cher relativement par rapport au prix du promoteur privé, étant indexé à 80 000 DA TTC le m2 pour le logement LPP, il reste toujours inaccessible.
Conditions d’éligibilité draconiennes, nombre de chantiers lancés insuffisant, la demande largement supérieure à l’offre, et dans le cas où on est bénéficiaire de ce fameux logement tant attendu, la durée de l‘attente pour le réceptionner est indéterminée, etc. Si le second est libre marché, celui-ci a atteint sur les centres urbains d’Alger 300 000 DA le m2, non pas selon le site ou standard mais au gré du promoteur. Qu’est-ce qui pourrait justifier cet écart ? En sachant que ces logements sont construits ou réalisés avec les mêmes matériaux soumis au même prix du marché des matériaux de construction, hormis l’assiette foncière et quelques équipements (dalle de sol, chauffage central, cuisine équipée) importés généralement de Chine, notent les experts.
Est-ce que cela justifierait le fait de quadrupler les tarifs, se demande-t-on. Non !, nous réponds M. M’hamed Sahraoui, un des premiers promoteurs urbanistes à se lancer dans la promotion haut standing, qui soutient qu’il n’y a pas de haut standing en Algérie sans norme et standard du marché. Selon le même interlocuteur, très au fait de l’évolution de ce marché privé, dans certaines promotions bâties sur le littoral algérois, le m2 a frisé les 600 000 DA le m2.
Si un F4 (100m2) LPP est proposé à 8 millions de dinars, son équivalent dans le privé est proposé à 2,5 MDA. Aujourd’hui, la question de prix de logement devrait être posée. Les écarts surestimés entre un AADL, un LPP et autre promoteur privé, ancien ou nouveau, qui s’improvise dans le créneau, nourrissent la spéculation de la bulle immobilière même sur le marché de l’occasion qui reste inaccessible.
Faiza Chettouh